dimanche 26 mai 2013

Si c'est un homme ...

Il y a des soirs où, appuyer sur le bouton qui éteint la lampe de chevet est tout bonnement impossible... parce que le film ou le bouquin nous garde prisonnier. 

Voici la cause de mes quelques soirs d'insomnies d'hiver...
Que celles qui cherchent un livre léger, pour se détendre ou bien rire, passent son chemin.  Ce livre est une merveille de mémoire mais qui vous remettra en cause.

Aujourd'hui on râle (moi la première) parce que le téléchargement d'un fichier est trop long, parce que la connexion internet est trop lente, parce que la télécommande est trop loin du canapé... 

Dans cette société là, qui a encore conscience qu'il y a moins de 70 ans nous étions en pleine guerre mondiale? 
J'ai la chance d'avoir connu mes grands pères qui ont vécu cette catastrophe humaine. Trop petite pour comprendre ce qu'ils m'expliquaient de leurs souvenirs, je le regrette à présent. 

Primo Levi est un Juif Italien de 24ans qui témoigne à travers ce livre, mois après mois, de sa détention au camp d'Auschwitz au cours de la seconde guerre mondiale.
Ce récit autobiographique nous apprend la vie quotidienne des prisonniers. Primo retranscrit avec détails les horreurs qu'il a subi, les ruses qu'il a dû apprendre, les coups toujours plus forts dont il a été victime, la souffrance qui l'attaquait et la mort qui le menaçait comme une épée de Damoclès en permanence. 

"Alors, pour la première fois, nous nous apercevons que notre langue manque de mots pour exprimer cette insulte : la démolition d'un homme. En un instant, dans une intuition quasi prophétique, la réalité nous apparaît : nous avons touché le fond. Il est impossible d'aller plus bas : il n'existe pas, il n'est pas possible de concevoir condition humaine plus misérable que la notre. Plus rien ne nous appartient : ils nous ont pris nos vêtement, nos chaussures, et même nos cheveux ; si nous parlons, ils ne nous écouteront pas, et même s'ils nous écoutaient, ils ne nous comprendraient pas. Ils nous enlèveront jusqu'à notre nom : et si nous voulons le conserver, nous devrons trouver en nous la force nécessaire pour que derrière ce nom, quelque chose de nous, de ce que nous étions, subsiste."

S'il n'y avait qu'un seul livre à lire ce serait celui ci. 
Ne serait ce que par respect pour nos grand parents. Respecter leur mémoire et leurs batailles. Respecter la mort des 70 millions de personnes qui sont tombés à terre et ne pas les oublier.
271 pages
Ce livre se lit très facilement et arrache aux plus sensibles et même aux plus fortes quelques larmes...

"Vous qui vivez en toute quiétude
Bien au chaud dans vos maisons,
Vous qui trouvez le soir en rentrant
La table mise et des visages amis,
Considérez si c'est un homme
Que celui qui peine dans la boue,
Qui ne connaît pas de repos,
Qui se bat pour un quignon de pain,
Qui meurt pour un oui ou pour un non.
Considérez si c'est une femme
Que celle qui a perdu son nom et ses cheveux
Et jusqu'à la force de se souvenir,
Les yeux vides et le sein froid
Comme une grenouille en hiver.
N'oubliez pas que cela fut,
Non, ne l'oubliez pas :
Gravez ces mots dans votre cœur,
Pensez-y chez vous, dans la rue,
En vous couchant, en vous levant ;
Répétez-les à vos enfants,
 Ou que votre maison s'écroule,
Que la maladie vous accable,
Que vos enfants se détournent de vous."

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